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TENDANCES SECTORIELLES

Comment l’évolution de la consommation des programmes cinématographiques et audiovisuels modifie la structure du marché au profit de nouveaux acteurs ? 

Le marché du cinéma et de l’audiovisuel traverse une mutation profonde de sa façon de se financer, de produire et de distribuer depuis plusieurs années, avec l’arrivée des géants du nets américains sur le marché. Ce processus a eu tendance à s’accélérer ces dernières années. 

Si le chiffre d’affaires français de la production cinématographique n’est guère éloigné de son niveau de 2008, celui de la production audiovisuelle grandit sans cesse depuis dix ans. 

Mains tenant un clap de cinéma et caméra en train de filmer

Evolution du secteur du cinéma et de l’audiovisuel

Si la production de programmes cinématographiques et audiovisuels reste dynamique, le constat est plus morose pour les salles de cinéma. Quels sont les consommateurs du cinéma, du streaming et de la télévision, et que regardent-ils ? 

Il existe une forte disparité entre les téléspectateurs et les clients de salles de cinéma. Elle s’exprime à tous les niveaux, tant sur le plan géographique (les centres urbains concentrant naturellement les salles de cinéma) que de l’âge. 

Analyse des préférences et types de contenus consommés au cinéma

Les spectateurs de salle de cinéma étaient 39,9 millions en 2022, c’est plus de 60% de la population française de plus de 3 ans, mais c’est moins qu’en 2019. Les spectateurs de 20 à 24 ans et de plus de 60 ans sont les plus nombreux à consommer des programmes sur grand écran et ont réalisé 3,8 entrées par spectateur cette même année1. Ils consomment principalement des films français et américains (au total plus de 80% des entrées) en même proportion, viennent ensuite les films européens non français et les autres. Les films français restent en dynamique, tandis que la part des entrées des films américains fléchie. 

Analyse des préférences et types de contenus consommés à la télévision

De l’autre côté, les téléspectateurs sont en majorité plus âgés, avec une moyenne d’âge à 57 ans. 2 127 films ont été diffusé en 2022, là encore ils sont principalement français (plus de 40%), mais les productions américaines n’arrivent qu’en troisième position derrière les films européens non français. La majorité de ces films sont des films de fiction. Si les films à la télévision ne représentent que 3,2% de l’offre, ils concentrent 5,4% de la consommation. 

Coûts de production et financement

Les caractéristiques des consommateurs de cinéma et de télévision diffèrent. Les productions cinématographiques et audiovisuelles d’initiative française restent au premier plan de la consommation en France. Quels sont les coûts des productions françaises et comment se financent-elles ? 

Quotas et structure des coûts de production

Tant à la télévision qu’au cinéma, les productions d’initiative française sont incontournables. Si cette forte présence s’explique en partie par les quotas imposé par les régulateurs, elle est aussi le fruit de la structure des coûts que partagent les productions françaises. 

En France, en effet, le fonds de soutien du Centre National du Cinéma (CNC) distribue entre 700 et 800 millions d’euros environ annuellement aux productions françaises. Sur les 738,5 millions d’euros de soutien en 2022, 58,3 millions étaient attribués en soutien exceptionnel dans le contexte de la crise sanitaire. Le cinéma est légèrement plus financé que l’audiovisuel par le CNC1

Dans le cinéma, ce financement représente en moyenne 8% environ du financement d’un film. 

Pour le reste, les producteurs apportent en moyenne 40% des ressources et les diffuseur 30%. 

Contribution des géants du streaming au financement

Jusqu’ici la production était dominée par les grands groupes français, comme Canal. Mais les grandes entreprises de la tech, notamment américaines, qui n’étaient jusqu’ici que des diffuseurs, deviennent des producteurs. Netflix, par exemple, en conséquence des obligations de financement du cinéma par les Services de Médias Audiovisuels à la Demande (SMAD) en Europe, s’est engagé à verser un minimum de 30 millions d’euros par an pour le cinéma hexagonal (4% de son chiffre d’affaires annuel en France)2. Au-delà des obligations légales, ces entreprises du streaming cherchent à développer leur production afin de fournir du contenu exclusif sur leur plateforme. 

Ainsi, par un effet de taille, le financement, même à la marge, du cinéma par les géants du streaming risque de propulser ces acteurs en tête des fonds de financement du cinéma et de l’audiovisuel hexagonal. 

Perspectives et défis pour l’avenir des secteurs du cinéma et de la production audiovisuelle

Si les aides publiques à la production se maintiennent, les producteurs changent. Les nouveaux moyens de consommer le cinéma et la production audiovisuelle métamorphosent le marché. Quelle place restera pour les acteurs historiques de la production, et quelle place prendront les nouveaux acteurs du streaming ? 

Les effets de l’essor du streaming sur la production

L’arrivée du streaming, dont la consommation a explosé ces dernières années, a modifié la structure du marché du cinéma et de l’audiovisuel par les deux bouts : d’un côté par les financements et les commandes, et de l’autre par la distribution. 

Si les grands acteurs de l’hexagone restent les acteurs historiques : Canal+, Banijay et TF1 par exemple, ils cherchent à protéger leur marché par la croissance interne et externe. Ainsi, si le taux de défaillance du secteur a nettement diminué depuis 2014 tant pour les programmes audiovisuels que pour les programmes cinématographiques, ces chiffres cachent la diminution du nombre d’acteur du secteur, qui se retrouvent plus concentré. Citons, par exemple, le rachat par Newen (TF1) de la société française Daï Daï Films en novembre 20223

Néanmoins, le marché de la production français semble bien connaître une arrivée de nouveaux acteurs étrangers, mais non une délocalisation de ses activités. Le taux de délocalisation de longs métrages d’initiative française diminue continuellement depuis 2015. Pour la première fois depuis presque 10 ans, il est passé en 2019 sous les 20%3

Les défis liés à la qualité de contenu et à la demande croissante

Une tendance de fond semble se poursuivre sur la production et la distribution des programmes audiovisuels et cinématographiques. Si les premiers sont en plus grande dynamique en France, les chiffres de l’ensemble du secteur restent en bonne direction. Ombre au tableau, les salles de cinéma n’ont pas récupéré leur audience de 2019. La vidéo à la demande s’est imposée comme moyen de consommation, et elle tant à capter le public des salles de cinéma qui avait déjà déserté la télévision. Ainsi, cette montée des acteurs du streaming ne semble pas nuire à la production cinématographique et audiovisuelle, au contraire, ils sont une nouvelle manne de financement très importante pour les acteurs de la production, et soutiennent la demande. Les consommateurs ne sont pas rassasiés, loin de là, les nouveaux moyens de consommation du cinéma et des programmes audiovisuels sont autant de débouchés extrêmement gourmands en contenu ; se pose la question de la qualité. 

Les acteurs historiques français se regroupent pour faire face à la force de frappe de la concurrence, et de nombreuses opérations de fusion et acquisition ont eu lieu dans le secteur, et cela risque de se poursuivre. Mais cette nouvelle architecture des grands acteurs du financement des programmes audiovisuel et cinématographe ne semble pas diminuer la valeur de ces financements, aux contraires, et les petites entreprises du cinéma, largement majoritaires en nombre, pourront continuer d’être financées par des géants, qu’ils soient de la télévision, enseignes historiques ou de la tech américaine. 

Sources :
1 CNC, Bilan du CNC les chiffres clés 2022, 2023. 
2 Le Monde, Netflix apportera 40 millions d’euros au cinéma français et européen cette année, 2022. 
3 Xerfi, La production de programmes cinématographiques et audiovisuels, 2023.
 

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